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Souviens-toi
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20 juillet 2016

J+43 : Allez viens, on va cruiser

En partant au Canada, j'avais trois objectifs. Par ordre de priorités, ça donnait :
1. Trouver un appart'
2. Trouver un job
3. Faire des rencontres.
En arrivant au Canada, j'ai vite compris que l'un pourrait difficilement se faire sans l'autre et j'ai revu l'ordre de mes priorités.

Connu sous le nom de "piston" et plutôt mal vu en France (on a tous eu droit un jour à cette phrase ponctuée de mépris "Ah, tu t'es fait pistonner..." sous-entendant clairement "Tu ne mérites pas ton poste."), le réseautage, au Canada, c'est LA base pour trouver un une job. D'ailleurs, se faire des relations et s'en servir pour évoluer, 1-ça porte un nom (avoir de l'entregent), 2-c'est une qualité très souvent recherchée chez un employé.
Et, peu importe le contexte dans lequel on les rencontre (la soirée blues de voisines qu'on n'avait jamais rencontrées, la soirée swing d'un bar du quartier...), les Canadiens sont toujours prêts à aider. C'est comme ça que tu te retrouves avec les coordonnées du chef exécutif d'une grand pâtisserie ou à poster une candidature recommandée par un employé. À terme, dans ma branche, on croise les fingers, ça finira bien par payer. En attendant, nouvelle du jour, bonjour : J'AI TROUVÉ DU TRAVAIL !!! Histoire d'ajouter une corde à mon arc tout en replongeant dans un domaine familier qui commençait à sérieusement me manquer, je vais travailler comme serveuse dans la pâtisserie d'un Meilleur Ouvrier de France installée dans le Vieux Montréal (quartier où les rues sont peuplées de voitures que je n'aurai probablement jamais les moyens de me payer !). 

Oui, bon, passées l'excitation, les félicitations, je vous vois venir : le travail, les amis, c'est bien beau mais qu'en est-il des amours ? Et là, roulements de tambours, c'est le moment d'aborder un sujet qui a de quoi déstabiliser les Français : "C'est vrai qu'au Canada ce sont les filles qui draguent ?"
Alors déjà, premièrement, ici, on ne dit pas draguer mais cruiser. Mais heu... cruiser comme dans cruise (une croisière, en anglais) ? Déformation professionnelle oblige, intrigué par l'origine du verbe, mon cerveau s'est imaginé Jacques Cartier - grand navigateur-explorateur du Canada - et ses matelos, en manque, sur les flots : "Hey, salut jolie sirène ! Ça te dirait d'aller boire une tasse d'eau salée ?" Mouai... il y a sûrement une autre explication ! 
Et, deuxièmement, c'est beauuucoup plus complexe que ça ! Avec cette histoire d'égalité, les femmes se doivent d'être un peu plus entreprenantes. Mais, ATTENTION ! Pas trop non plus. Parce que, si les Québécois sont plus timides que les Français (timides genre si tu te fais accoster dans la rue ou le métro, tu peux facilement parier sur sa non-autochtonalité), ils ont leur fierté. Hors de question de se laisser émasculer ! Mais, du coup, "entreprenante", ça veut dire quoi ? Envoyer des petits signaux qui encouragent monsieur dans la bonne voie. Heu... c'est-à-dire ??? Pas d'inquiétude à avoir, il paraîtrait qu'en tant que Française, la séduction, j'aurais ça dans la peau. Moui, boh, personnellement, j'émets quelques doutes sur la question. 

Une fois le rapprochement conclu, on pourrait se croire tirés d'affaire... mais que nenni ! Les différences inter-culturelles ne font que commencer. Bienvenue au pays des dates !
Une date /dèïte/ est une personne que l'on "côtoie" à un degré plus ou moins poussé selon les cas, allant de la sortie ciné aux câlins sous les draps. Cette relation n'ayant rien d'officiel, il est, de ce fait, techniquement possible de dater d'autres personnes en parallèle. Bonjour le planning de fou à gérer ! Une fois les nombreuses étapes (coup d'un soir, plan cul, sex friend... mais où est donc passé le romantisme ?) de l'échelle relationnelle franchies, pour avoir l'exclusivité, il faut en passer par le talk : LA fameuse discussion officialisant une relation. Une conversation sur ses sentiments. Rien qu'à l'idée, j'ai envie de détaler dans la direction opposée ! 

S'il est encore possible de rencontrer son interlocuteur de conversation flippante de manière traditionnelle (car, à Montréal, de nombreux bars proposent des soirées dansantes en-veux-tu-en-voilà... swing, salsa, kizomba, il y a du choix !), timidité masculine + génération hyper connectée qui ne pose pas les yeux sur son voisin d'à-côté = les Montréalais en sont réduits à s'inscrire sur des sites spécialisés pour pouvoir se rencontrer. Oh boyyy! Tout ce que j'aiiime. Mon détalage dans la direction opposée n'est vraiment pas prêt d'arriver !
Bon et puis, après mûre réflexion (hiver + froid = un Canadien-radiateur-sur-pattes grand et fort ça pourrait être pas mal pour me réchauffer), pourquoi attendre pour en arriver, dans quelques mois, à la même conclusion ? J'ai donc pris le taureau pas les cornes et, mon nouveau téléphone me le permettant, j'ai téléchargé Tinder.
Oui, oui. Moi. Sérieux. On peut d'hors et déjà lancer les paris sur la vitesse à laquelle je vais la désinstaller.

Aaaah, Tinder, Tinder, Tinder. L'application censée t'aider à trouver chaussure à ton pied qui finit surtout par déstabiliser tes convictions à l'égard des garçons !
Étape n°1 : Tu crées ton profil. Tu réalises au passage que sur le seul portrait souriant de toi que tu as - toi, la papparazzi - ton visage est recouvert d'une toile d'araignée et tes cheveux d'une perruque noire et blanche surmontée d'un chapeau pointu. La sexy-attitude à fond les ballons, quoi !
Étape n°2 : Tu essaies de comprendre le fonctionnement. Trois boutons - un pour les thons, un pour les mignons, un pour les top canons - ça paraît plutôt simple. Oui mais Tinder joue parfois les polissons en inversant les boutons. Et c'est ainsi que tu te retrouves, malgré toi, à superliker un mec que tu trouvais "juste" mignon.
Étape n°3 : Tu fais défiler les profils, identifies facilement les Québécois grâce à leurs prénoms et t'aperçois que Marc-André, Luc-Antoine et tous leurs amis ont souvent des sourcils aussi gros que leurs bras. Heu... dois-je commencer à paniquer sur la quantité d'O.G.M. présente dans les fruits et légumes proposés sur le marché ? 
Étape n°4 : Tu es likée en retour. Tinder t'annonce alors que, comme vous avez matché, vous pouvez commencer à discuter. Et là, ton cœur s'accélère. Ouaaah, c'est peut-être mon futur mari, le père de mes enfants, le... sauf que (déstabilisation sentimentale acte I) heu... loulou, Tinder a dit qu'on pouvait converser. T'attends quoi pour venir me parler ??? Virtuellement aussi c'est aux filles de faire le premier pas ?
Étape n°5 : Tu te jettes à l'eau, tu entames la conversation. - "Hey! :)" - et tu attends... interminablement. Heu... pourquoi tu m'as likée si c'est pour ne pas venir me parler ? J'avais mis un smiley pourtant. Un smiley qui sourit, c'est plutôt gentil. Nan ? C'est peut-être trop entreprenant d'entamer une conversation...
Étape n°6 : Tu likes à foison, ton cœur, acclimaté aux matchs à répétition, n'a plus aucune réaction, et tu attends patiemment (genre, comme au 18ème siècle !) qu'un bonhomme, un vrai gentilhomme entame la discussion.
Étape n°7 : Tu converses avec un Québécois. Ascenseur émotionnel ascendant : tu es contente car tu ne vois pas l'intérêt de partir aussi loin pour finir avec un compatriote. Et puis, tu n'es pas contre l'idée d'ajouter une nationalité à ton tableau post-it de chasse. Ascenseur émotionnel descendant dégringolant : tu réalises que ton Québécois "pure laine" (pour reprendre ses termes) a des tendances sadomaso. "Pas fan des Français (...) chiants et hautains", lui qui chiale (râle) tout autant rêve de coucher avec une Française, soit l'incarnation même de tout ce qu'il déteste. Heu... ??? 
Le fantasme de la prof, le fantasme de la femme plus vieille expérimentée et maintenant le fantasme de la française... Aaaah, petit post-it, à ce rythme-là, l'hiver prochain, ce sera juste toi et moi. À se demander si un homme aura un jour envie de moi pour ce que je suis vraiment... ?
Étape n°8 : Tu converses avec un Français (à priori aucun risque qu'il tripe sur ta nationalité). Sauf que - déstabilisation sentimentale acte II - de fantasme, tu passes à... trou. Autant être honnête, mon ego a pris un coup.
Lui : Salut, sympa le costume de sorcière.
Moi : Merci !
Lui : Sexe ?
Moi : Genre là maintenant tout de suite ?
Lui : Oui, la vie est courte.
Heu... loulou, tu pourrais au moins faire semblant de me cruiser ! Bref, tu lui expliques pourquoi non-ça-ira. À la vue du monologue qu'il t'envoie, tu réalises que, sans le vouloir, tu l'as vexé. Tu désamorces le conflit. Après tout, c'est pas grave si on ne cherche pas la même chose, il y a sûrement tout un tas d'autres Tindeuses prêtes à satisfaire ses fantasmes les plus fous. Toi, tu penses que la conversation va s'arrêter mais non, monsieur rebrousse chemin et te propose d'aller boire un café. Heu... ça veut dire que j'ai gagné ? Hum... non louloute, l'amour, c'est pas une compétition.
Étape n°9 : Tu converses avec des garçons plus réglos, tu continues la discussion autour d'un brunch ou d'un verre et puis... plus de nouvelles, plus rien. Toi, perchée dans ton monde des bisounours, tu les trouvais gentils, tu les aurais bien gardés comme potes de sorties. Oui mais, dans le monde des grands, ça marche différemment. La génération actuelle c'est un peu tu-me-plais-ok-tu-me-plais-pas-au-suivant. Le juste milieu on-devient-potes, y a pas !
Étape n°10 : Si Tinder t'as permis de découvrir de nouveaux bars, restaurants, quartiers, un mois plus tard, tu as renoncé à créer de nouvelles matchs, tu n'entames plus de nouvelles conversations et tu réponds à peine aux questions. Bref... démotivation à fond les ballons !
Tinder, toi et moi, ça va faire un mois qu'on se côtoie. Mais, j'ai beau essayer, je n'y arrive pas. C'est pas toi, c'est moi. Je ne suis juste tout simplement pas faite pour toi.

Pour terminer sur une petite note de gaieté, voici un petit palmarès-cruisage :
1. "On se jase ce soir ?" Comprenez "On parle/tchatte/discute/converse ce soir ?"
2. "Tu veux-tu danser ?" Hum... pas si tu me le demandes comme ça. C'est pourtant pas compliqué ! Allez, répète après moi : "Tu veux danser ?"
3. "Si je te rolles un 5, tu danses avec moi ?" Et si c'est pas un 5, il se passe quoi ? Ah ben, en fait, la question ne se pose pas car toutes les faces du dé sont ornées de 5 petits points. Bon, ben, on va swinger ?

art

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